15 Aout 2016
Une belle course c'est comme un bon vin, on apprend à l'apprécier avec l'âge.
Ma première aventure sur cette épreuve datait d'il y a 5 ans, cela peut paraître relativement court, mais j'étais un homme très différent à l'époque.
Entre temps, j'ai épousé la femme de ma vie, j'ai été père deux fois, j'ai beaucoup voyagé, j'ai monté ma boite de coaching, et je me suis même rapproché dernièrement de mes propres parents, ceux qui m'ont donné la vie, avec qui les relations n'ont pas été toujours évidentes depuis ces vingt dernières années...
J'ai trouvé beaucoup de sens à ma vie à travers toutes ces étapes.
Je peux le dire aujourd'hui, et sans complexe, je suis un homme heureux!
J'ai certainement perdu au passage mon côté ultra compétiteur de mes débuts en triathlon, mais je vois çà maintenant comme un mal pour un bien.
Embrun dans tout ça? Un moyen de tester ses limites, parce que cela fait partie de ce que l'on cherche à travers notre pratique.... Et que demander de plus de la part d'un coach/ athlète que de partager cette aventure humaine avec 9 de ses athlètes!
Embrun, j'y retourne une ou deux fois par ans depuis 2011...
J'ai vu la course sur le bord en 2013 quand ma femme défiait les lois de la nature en bouclant l’épreuve à peine 6 mois après avoir accouché de notre fille,
J'y suis régulièrement en stage,
C'est sûrement (avec Berk sur mer!) le deuxième endroit de "vacances" ou j'ai été le plus dans ma vie.
Le cadre est somptueux et se suffit à lui tout seul pour justifier la folie qui nous traverse l’esprit lorsque l'on s'inscrit!
Me voilà sur un balcon au début de la montée de Chalvet la veille, les montagnes en face, le soleil se couche, la montagne "rougit" et me donnerai presque envie de dessiner, j'y suis, c'est demain...
Quelques heures plus tard, Usain Bolt vient de gagner son troisième titre olympique sur 100m, et je me retrouve sur ce même balcon dans la nuit, une belle nuit d'été, j'ai même la chance de voir quelques étoiles filantes le temps d'un café allongé, moment partagé avec mon José et peu de temps après avec celle qui compte le plus pour moi.
La montagne est splendide, elle est immense, elle me défie...
La montagne est toujours là 2h plus tard au moment du coup de pistolet...
Une natation sans encombre plus tard, me voici dans la montée des Puys....
Des athlètes me doublent, ce ne sont pas des concurrents, aujourd'hui je ne fais pas la course.
Rapidement mon estomac ne se montrera pas très coopératif (facilement explicable dans la magie du stress d'avant course je fais à peut prêt tout ce qu'il ne faut pas faire et que je déconseille tout au long de l'année sur la diététiques les heures avant le départ, la prochaine fois je me met un post it en mémo pour le matin...), et va un peu me gâcher la fête, le vélo sera un aller retour entre total kif et retour à la réalité d'un estomac qui a rendu tout son petit dej au bout de 20km de vélo et n'a pas voulu se relancer correctement pour la suite de la journée.
La déshydratation me vaudra quelques bonnes crampes dans l'Izoard, le manque d'énergie me vaudra un retour très compliqué à partir de Réotier.
Mais rien de tout ça ne pourra gâcher la fête, je suis dans les balcons sur le retour je m'arrête à une énième fontaine pour me refroidir, le soleil nous défie lui aussi aujourd'hui, mais je sais que bientôt, très bientôt je vais retrouver ma femme sur le bord, et que la lueur dans ses yeux me relancera à elle toute seule.
Pose du vélo, c'est parti en càp sur la digue, le Grand Morgon (ça en fera sourire certains) est là, il nous a défié toute la journée, c'est le plus imposant, le plus visible, le plus beau, il en a vu passer de l'athlète en quête de défi sur ses terres, je suis loin d'être le premier qu'il est en train d'essayer de terrasser, et pourtant je résiste, je résisterai même plutôt bien pendant le premier semi, poussé par les encouragements du public, galvanisé par ma femme...
Mais les lois de la physiologie me rattraperons assez vite et je paierai sur le deuxième semi mes déficits d'apports énergétiques et hydriques depuis le début de la journée.
J'essaye de parler à mon estomac mais il ne veut rien entendre....
J'insulte le Grand Morgon mais il sourit...
J'avance, toujours avancer, c'est la leçon retenue de 2011...
A la dérive je croise quelques mirages...
Un Queg et un Guntar qui fait quelques mètres avec moi, je ne suis plus lucide,
Mon Pépouze qui a l'air parfait à l'entame de son 2ème tour,
Nad qui me booste dans la dernière montée de la ville....
Et puis Ivan, qui me reprend juste avant la descente, je veux en finir, je repars en trottant avec lui,
Et le corps humain est quand même bourré de ressources insoupçonnées, celà fait 1h30 que je ne peux quasi rien mettre dans mon ventre sous peine de énième vomi, mais mes jambes repartent, je recours, lentement mais sûrement, je me retrouve même à raconter tout et n'importe quoi à mon acolyte (désolé :) ) je croise une dernière fois ma femme, elle est radieuse...
Quelques kilomètre plus loin nous voilà main dans la main avec Ivan pour franchir cette ligne d'arrivée, un honneur de finir avec cet athlète discret, très talentueux mais surtout avec un état d'esprit admirable.
Je suis au bout du rouleau, complètement vidé, j'ai été au bout de moi même, j'arrive à me traîner jusque derrière les barrières pour retrouver mes supporter du jour, Nad m'apportera une bonne glace à l'italienne, un plaisir simple qui sera à ce moment là une bénédiction pour mon petit corps meurtris.
L'Embrunman du cru 2016 est terminé, félicitation aux vainqueurs (homme et femme!) mais aussi à tous les concurrents, félicitation à Guigui qui nous a sorti une course d'enfer, félicitation à tous mes athlètes présents qui sont venu relever le défi même si la course aura eu raison de la moitié des effectifs, c'était un bonheur de partager cette journée avec vous.
Et un immense merci à tous ceux qui m'ont supporté de prêt ou de loin avant pendant et après cette journée,
Même si la performance n'a pas été à la hauteur de mes espérances, j'ai encore beaucoup appris sur moi même aujourd'hui,
Et j'en suis maintenant sûr, lorsque l'on sait apprécier un Embrunman à sa juste valeur, cette seule course nous fait
grandir un peu plus en tant qu'homme.
Vive l'Embrunman, vive le sport, vive la vie!